Un motard inquiet

Il venait juste de quitter son domicile pour aller faire son jogging, quand le passage du vélomobile l’a arrêté net, en pleine rue d’un quartier de Bevaix. Son étonnement était tel que j’ai choisi de ne pas simplement poursuivre ma route.

« C’est quoi votre machin? C’est génial ce truc! » commence-t-il.

Après ma brève présentation de l’Alleweder, il poursuit en m’expliquant qu’il est un motard qui n’ose presque plus sortir avec sa machine. La raison tient au manque de respect qu’il constate allant croissant sur les routes. Trop de frayeurs issues du trafic automobile, ce d’autant plus que les véhicules n’arrêtent pas de prendre de l’embonpoint selon lui. Il résume en invoquant la loi du plus fort comme principe désormais dominant sur les voiries. Son autre courroux? Les gros 4×4 qui se parquent n’importe comment, occupant souvent deux places disponibles ou même carrément hors-case, cela afin d’être au plus près de l’endroit où leurs conductrices – il trouve qu’il y a beaucoup de mamans dans ces engins-là – doivent faire une petite emplette.

Revenant au thème de la petite reine, Pierre Ponci m’explique qu’il est opposé aux vélos électriques. Ah bon? « Ben oui, parce que si tous les cyclistes s’y mettent, il faudra construire encore des centrales nucléaires! » Je me rends compte que je vais devoir vraiment creuser un peu la chose car cette remarque m’est souvent faite, au même titre que les dégâts causés à la nature en raison de la production des batteries ou des panneaux solaires. Chouette, plusieurs rencontres que je prévois de faire devraient justement me permettre de séparer le bon grain de l’ivraie. En même temps, j’ai déjà souvent discuté de cette problématique avec l’ingénieur qui a supervisé le volet technique de mon projet et, à chaque fois, il m’a dit la même chose: tout dépend d’où l’on part… bien entendu que si des piétons ou des cyclistes sans assistance se mettent à acheter des vélos électriques, autrement dit que cela devient un objet en plus dans le garage, c’est pas terrible. En revanche, si cette dernière acquisition permet de retirer définitivement, ou presque, une voiture de la route, la planète en sort gagnante.

Avec le Bevaisan, la discussion tourne ensuite autour des sources d’énergie et de la mobilité en général. Il me dit que, malheureusement, le lobby du pétrole est encore trop puissant. Il aime la nature, ça oui, mais moins les écolos qu’il estime souvent trop intégristes. Et les transports publics? « Essayez de faire Bevaix-Bôle avec et vous comprendrez pourquoi j’utilise ma voiture », me répond-il. «Et puis, c’est irréaliste de vouloir mettre tout le monde dans le train, il n’y a pas assez de place. Non, et vous savez, le vrai problème c’est l’éloignement des magasins par rapport à l’endroit où on vit. Regardez, si je voulais aller faire mes commissions à pied depuis ici, il me faudrait 30 minutes. Et, dans le coin, ça monte de partout, c’est donc très fatigant. »

A-t-il envie d’essayer mon vélomobile… électrique? Comme beaucoup de gens, il a tout d’abord peur de le casser, cela alors que j’entame à peine mon voyage. Ensuite, une fois à l’intérieur, il est ravi. Les quelques mètres qu’il effectue à son bord l’enchantent, définitivement. Un défaut peut-être? Il évoque l’accessibilité; « Je ne suis plus aussi souple que par le passé »rigole-t-il.

Pierre Ponci: "Pour aider à la sortie, il faudrait des poignées là-haut!"

Pierre Ponci: « Pour aider à la sortie, il faudrait des poignées là-haut! »

Un dernier conseil avant que je reprenne ma route? « Continuez d’écouter le monde comme vous le faites car sinon, à force de prendre les gens pour des cons, ils le deviennent. Mettez-la dans votre article, cette phrase, elle est bien! »

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